Industry research for large-scale sustainability
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04.12.2021

Une politique incohérente
menace l’agriculture durable


Depuis des années, une pensée globale est exigée. Il s’agit d’un aspect important du mouvement écologique. S’il s’agit de retirer ses œillères, nombreux sont ceux qui peuvent être d’accord avec cette exigence de globalité. Nous devons admettre en toute sincérité que la globalité absolue ne peut être atteinte. Mais dans les débats, on peut au moins aborder les conflits d’objectifs et faire des compromis avisés.

La recherche de la cohérence est plus modeste et plus réaliste. Le terme «cohérence» vient du verbe latin «cohaerere», qui signifie «être lié». Si la globalité disparaît sans cesse à la manière d’une ombre, il n’y a pas de mal à penser au moins en termes de liens. Bien sûr, cela s’applique aussi à la politique. Les liens sont particulièrement importants si l’on souhaite vraiment atteindre des objectifs politiques et pas seulement «faire quelque chose».

La cohérence politique fait souvent défaut, en particulier dans l’agriculture et la filière agroalimentaire. Il manque une vision cohérente, et les mesures incitatives sont inappropriées. Parfois, des mesures s’auto-sabotent. C’est vrai à grande et à petite échelle. Dans la stratégie agricole européenne «Farm to Fork», il manque une perspective globale. Trois études importantes sur les répercussions montrent que la réduction des produits phytosanitaires et l’augmentation de la part de l’agriculture biologique à 25% des surfaces cultivées ont des incidences massives sur la productivité de l’agriculture de l’UE. Une productivité réduite de l’agriculture de l’UE va à l’encontre des efforts visant à garantir la pérennité de l’approvisionnement au niveau régional. Et les objectifs européens se heurtent à l’objectif global de nourrir environ dix milliards de personnes en 2050 car la production sera délocalisée. Cette approche n’est ni durable, ni économe en ressources.

Selon l’étude du Centre commun de recherche de l’UE (JRC), la stratégie Farm to Fork entraînera non seulement une délocalisation de la production, mais aussi des atteintes à l’environnement. L’étude américaine USDA table sur une baisse de 12% de la production agricole dans l’UE et sur une hausse des prix de 17%. Les premiers résultats de l’étude d’impact de la Wageningen University and Research (WUR) commanditée par un groupement d’associations de la filière agroalimentaire vont dans le même sens. Les objectifs politiques de l’UE guidés par des motivations écologiques diminuent la production agricole européenne et transfèrent l’empreinte écologique ailleurs. Du point de vue de l’économie agricole européenne, la Commission de l’UE doit impérativement considérer les objectifs agricoles de manière globale. Car la cohérence politique fait défaut.

Nous pouvons aussi apprendre de l’UE. La culture de betteraves sucrières est une volonté politique de la Suisse. «Du sucre suisse», dit la publicité, «naturel, naturel». Mais la culture de la betterave sucrière est une véritable science. En effet, les betteraves sucrières ont de nombreux ennemis. Elles sont sous la menace des ravageurs et de maladies comme le jaunissement viral. Pour maîtriser ces menaces, des semences enrobées de néonicotinoïdes ont été autorisées d’urgence dans de nombreux pays européens. Les agriculteurs avaient besoin de toute urgence de cette technologie pour protéger leurs cultures. Ces pays de l’UE disposent de systèmes de régulation élaborés en matière de santé et de normes très strictes. En 2020 et 2021, l’autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) a expressément soutenu les décisions des États membres concernant l’homologation des néonicotinoïdes car les agriculteurs n’avaient pas d’autres alternatives praticables: «soit parce qu’aucune méthode ou produit alternatif – chimique ou non chimique – n’était disponible, soit parce qu’il existait un risque que l’organisme nuisible développe une résistance aux produits alternatifs disponibles».

Mais en Suisse, l’utilisation de ces produits n’est pas autorisée. Les agriculteurs doivent renoncer à une protection phytosanitaire efficace. Pendant ce temps, les autorités politiques augmentent la protection aux frontières et distribuent des subventions. Mais si les agriculteurs ne peuvent pas protéger leurs cultures, ni les subventions ni la protection des frontières n’ont d’utilité, et les agriculteurs hésitent à accepter cette offre en trompe-l’œil. En effet, l’argent ne remplace pas les pertes de rendement.

Les liens ne sont pas non plus cohérents sur le plan écologique. Les autorités veulent protéger les abeilles. Or l’enrobage de semences avec des néonicotinoïdes ne présente pas de danger pour les abeilles. En effet, les betteraves sucrières sont récoltées avant leur floraison. Grâce à un mode de culture approprié, le risque minime peut aussi être écarté pour les cultures suivantes. Alors que l’enrobage de semences, méthode respectueuse de l’environnement, est interdit, les produits phytosanitaires de surface sont autorisés en cas d’urgence. La branche veut demander de nouvelles approbations d’urgence pour 2022. Ces produits peuvent être moins favorables aux abeilles. Cela illustre aussi le manque de cohérence des autorités politiques.

Le colza est également un symbole des liens que l’on occulte. En Suisse, la constitution de réserves obligatoires s’applique aux semences de colza mais il n’y a plus de produits phytosanitaires pour protéger les champs. Actuellement, de nombreux produits phytosanitaires plus respectueux de l’environnement sont bloqués dans le processus d’autorisation. La procédure d’autorisation coince à tous les niveaux. C’est pourquoi les associations sectorielles exigent une harmonisation avec l’autorisation par l’UE. En effet, de nombreux produits phytosanitaires homologués depuis des années dans l’UE ne sont pas disponibles pour les agriculteurs suisses. Les paroles «renforcement de la production régionale» doivent être suivies d’actes!

Les interdictions technologiques ne tiennent pas non plus compte des liens: Cultivé de manière ciblée, le colza pourrait remplacer le soja comme aliment pour le bétail, mais l’édition génomique continue de tomber sous le coup du moratoire sur les OGM. Les importations de soja sont critiquées, mais dans le même temps, on fait abstraction du lien avec le moratoire et la sélection ciblée. De plus le colza peut avantageusement remplacer l’huile de palme, très critiquée. La société veut remplacer l’huile de palme tropicale par des produits locaux. Mais là encore, les liens sont occultés.

D’ailleurs, les agriculteurs biologiques utilisent l’huile de colza comme insecticide dans l’agriculture biologique. Le colza local est un produit aux multiples vertus. Dans le même temps, il s’agit d’une culture délicate. Plusieurs nuisibles se répandent dans les champs de colza et menacent les récoltes. Sans produits phytosanitaires synthétiques, la culture du colza dans notre pays n’est pas possible. De manière générale, le colza est un bon exemple de l’absence de cohérence dans les choix politiques.

Récemment, l’organisation de la branche swiss granum a relevé une incohérence similaire. Elle veut renforcer la «suissitude» et a lancé la marque «Pain suisse». Le label garantit 80% de blé suisse. Cette année, les contingents d’importation doivent toutefois être globalement augmentés, car les récoltes nationales sont littéralement tombées à l’eau. De plus, la quantité et la qualité des récoltes de blé suisse laissent à désirer. Cette situation s’explique par le temps humide et par une diminution de l’offre de produits phytosanitaires décrétée par les autorités.

En Allemagne, la nouvelle coalition au pouvoir veut interdire le glyphosate jusqu’en 2023. Mais une agriculture respectueuse des sols et du climat n’est guère envisageable sans herbicides. Après la suppression d’autres substances actives, le glyphosate reste le seul herbicide foliaire à spectre d’action large. De nombreuses méthodes de semis direct respectueuses des sols et du climat ne peuvent être mises en œuvre sans glyphosate ou entraîneraient une utilisation d’herbicides sensiblement plus élevée dans les cultures suivantes. Un rapport d’expert publié fin 2020 par l’Office fédéral de l’agriculture met en évidence les inconvénients des solutions alternatives déjà disponibles aujourd’hui. Les solutions de remplacement augmentent le risque d’érosion des sols. De plus, elles engendrent des coûts de production plus élevés. Le contrôle des mauvaises herbes vivaces est plus difficile avec ces méthodes. De plus, par rapport aux méthodes à base de glyphosate, les méthodes mécaniques actuelles impliquent une consommation énergétique plus importante et entraînent des émissions de gaz à effet de serre plus élevées. Les autorités politiques occultent les liens pour les apparences publiques.

Cela vaut aussi pour le génie génétique. Il est incohérent sur le plan politique que la culture classique par mutation, qui intervient dans le génome à l'aide de produits chimiques et de rayons radioactifs, soit qualifiée de "sans OGM" et soit autorisée, alors que des méthodes d'intervention beaucoup plus précises et douces doivent être considérées comme des OGM et interdites. Tout le monde veut une agriculture durable. Mais celle-ci a aussi besoin des outils correspondants. Et c'est par exemple le cas de l'édition très précise du génome pour des cultures plus résistantes. Globalement, il est incohérent d'interdire des techniques et de bloquer des innovations. Une agriculture durable au sens large et efficace en termes de ressources a besoin de sécurité de planification et de cohérence.

La rédaction swiss-food

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